Cinq pistes pour remettre les finances publiques sur les rails

Alors que l’INSEE et Bercy redoutent une brutale dégradation du crédit de la France, le gouvernement semble démuni, évoquant diverses mesures sélectionnées pour ne pas heurter ses électeurs avant les européennes. Cette façon de gouverner n’est évidemment pas à la hauteur de l’enjeu. Pour que l’année 2024 soit pour la France ce qu’a été l’année 1992 pour la Suède – un redressement spectaculaire – il parait indispensable d’envisager cinq actions concrètes.

1 – Demander aux retraités de payer une part équitable d’un système de santé dont ils sont les premiers bénéficiaires. Par ailleurs, les retraités aisés devraient assumer le coût des aides nécessaires à leurs contemporains retraités moins chanceux. Ce principe de solidarité intragénérationnelle a pour immense avantage d’alléger la charge lourde, croissante et injuste pesant sur les générations actives. Dans le même ordre d’idée, il serait pertinent que la revalorisation des pensions de retraite soit fonction de l’évolution prévisible des cotisations engrangées la même année et de la démographie, et ce pour chacun des régimes, afin d’assurer leur équilibre lorsqu’ils fonctionnent par répartition. L’indexation des retraites sur l’inflation est une hérésie économique.

2 – Utiliser le potentiel fiscal largement sous-exploité de la fiscalité immobilière. Un rapport récent du CPO montre que la taxe foncière prélevée dans les territoires déshérités (banlieues, 93, diagonale du vide…) dépasse souvent 0,6% de la valeur économique des propriétés privées, alors que ce taux est inférieur à 0,1% dans les zones opulentes (centres des grandes villes…). Cette iniquité fiscale s’explique par plusieurs facteurs dont aucun n’est légitime. C’est pourquoi nous préconisons que le taux de la taxe foncière soit uniformément fixé à 0,6% de la valeur vénale des biens détenus. Si les foyers modestes supportent actuellement ce taux, il n’y a pas de raison pour que les plus aisés en soient dispensés. Une contrepartie logique de cette mesure devrait être la suppression de toute fiscalité économiquement nocive (frais de notaire, taxes sur les successions, prélèvement sociaux et IR sur les loyers perçus).

3 – Basculer vers le secteur privé, en conservant un fort contrôle réglementaire et un soutien financier consistant, une part importante des services publics qui dans d’autres pays ne sont ni pilotés par des élus ni financés par l’impôt. Ceci concerne à l’évidence les secteurs de la santé, de l’éducation et des transports.

4 – Unifier les prestations sociales, actuellement accordées en fonction de combinaisons complexes de critères médiocrement pertinents et toujours incohérents. On ne peut que déplorer la surcharge administrative et la maltraitance générées par cette complication dont on discerne mal l’intérêt. Pourrait-on s’en passer ? Oui, en fusionnant les différentes redistributions actuelles avec l’impôt sur le revenu en un « impôt négatif français » républicain dont les règles de calcul extrêmement simples s’appliqueraient uniformément à tous les citoyens, quelques soient leurs revenus d’activité, de remplacement et de propriété.

5 – Ignorer les avis des caciques du système étatico-social, qui sont un obstacle redoutable à la mise en œuvre des quatre propositions précédentes. Ces conseillers vivent de la complexité, qu’ils soient hauts fonctionnaires, experts de diverses spécialités ou en tout. Ils ne craignent rien tant qu’une simplification hardie qui les priverait de leurs rentes de situation. Ce constat n’a rien d’original. Il explique qu’une candidate a proposé un « comité de la hache » et qu’un président a été élu dans l’hémisphère sud en brandissant une tronçonneuse. Valorisons la connaissance des philosophes, des mathématiciens, des scientifiques et des ingénieurs qui œuvrent pour la vie, la paix, la liberté de l’Homme et l’équilibre de la Planète. Dédaignons les constructions intellectuelles des idéologues, des juristes prolifiques et des communicants volubiles qui manipulent et soumettent les masses à leurs chimères.

Ces cinq pistes de réflexion ont pour caractéristique commune d’irriter quelques millions d’électeurs vivant de rentes – retraités et propriétaires aisés, haut-fonctionnaires, syndicats, experts – qui en garderont probablement un souvenir amer. Est-ce grave ? Même s’ils sont les plus actifs dans les partis politiques et contrôlent totalement les instances officielles, ils sont largement minoritaires. La démocratie devrait survivre à leur dépit si les autres citoyens se mobilisent.

Article publié dans Atlantico le 30/03/2024

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